Un rapport parlementaire propose 76 solutions contre la désindustrialisation en France

La commission d’enquête de l’Assemblée nationale insiste sur le fait « de réconcilier les Français avec l’industrie ».

Le nombre d’emplois industriels comme la part de la valeur ajoutée industrielle dans le PIB ont été divisés par deux en cinquante ans, faisant de la France l’économie la plus désindustrialisée du G7, avec celle du Royaume-Uni.

 Conseil d’analyse économique ou de la Cour des comptes : des « évolutions structurelles » et « des choix rétrospectivement discutables », à l’image du concept d’entreprise sans usine ou fabless, popularisé en 2001 par Serge Tchuruk, PDG d’Alcatel, « une utopie coûteuse en termes de perte d’emplois et de souveraineté ». Elle a conduit à des délocalisations massives de la production dans des pays censés être les « ateliers du monde », lesquels sont, depuis, montés en gamme et rivalisent avec la France, y compris en termes de recherche et développement.(R&D).

Les 76 solutions préconisées sont très variées, avec, pour objectif premier, souhaiterait Gérard Leseul, « de réconcilier les Français avec l’industrie », en construisant « un nouveau pacte productif » : il faut trouver un consensus sur les priorités à donner à la politique industrielle à long terme.

« Il faut sortir du clivage patrons contre salariés »

En organisant, par exemple, « une grande conférence industrielle nationale » sur le territoire, avec l’ensemble des parties prenantes (Etat, régions et intercommunalités, entreprises, partenaires sociaux, représentants de l’éducation nationale et de la société civile). Mais aussi en renforçant à 25 % ou à 30 % la présence des représentants des salariés dans les conseils d’administration des ETI et des grandes entreprises, pour les associer davantage aux décisions. « C’est une mesure que prônait déjà le rapport Gallois il y a dix ans ! Il faut sortir du clivage qu’on connaît trop en France, patrons contre salariés », insiste Gérard Leseul.

Pour une plus grande cohérence, il suggère aussi la création d’un grand ministère, qui réunirait l’industrie, la recherche technologique et l’énergie. Il conviendrait de renforcer la prospective pour prioriser les relocalisations, en établissant une cartographie des activités et produits exposant le pays à une dépendance vis-à-vis de ses concurrents. Ce diagnostic partagé n’existe pas, et aucune instance n’est chargée de résoudre ces vulnérabilités à moyen ou à long terme.

Repenser le rôle de l’Etat actionnaire

Le rapport rappelle certains « bienfaits » de la crise, les investissements permis par le plan de relance et France 2030 étant loués par tous les auditionnés. Mais pourquoi, interroge-t-il, ne pas conditionner, à l’avenir, les aides ainsi pourvues à des engagements « en termes de localisation d’activités, d’emplois, de compétences et de partage équitable de la valeur » ?Le crédit d’impôt recherche, qui coûte à l’Etat 6,5 milliards d’euros par an, pourrait être conditionné à la localisation, en France, des chaînes de production.

L’Ile-de-France menacée d’une nouvelle désindustrialisation

Le rapport suggère en outre de pérenniser certaines mesures prises depuis deux ans. Comme celle d’abaisser à 10 % le seuil d’acquisition des droits de vote permettant le contrôle par l’Etat des investissements étrangers dans des sociétés françaises stratégiques. Il plaide pour repenser le rôle de l’Etat actionnaire ; il semble « nécessaire » qu’il prenne des participations dans les entreprises « dont le caractère vital serait reconnu », comme celles des produits de santé.

A l’heure où la France préside le Conseil européen, le rapport rappelle enfin l’importance d’œuvrer à plus d’harmonisation fiscale et sociale au sein de l’Union, alors que l’engagement de l’Europe à atteindre la neutralité carbone en 2050 a bouleversé toutes ses industries.

https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/01/20/un-rapport-parlementaire-propose-76-solutions-contre-la-desindustrialisation-en-france_6110212_3234.html#xtor=AL-32280270-[default]-[android]